Tokyo accueille en ce moment les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), l’occasion d’interroger l’impact des Jeux sur le secteur du sport au service du développement et de la paix (SDP).

Outre les retombées économiques, l’impact social des grands événements sportifs est désormais scruté. Premier rendez-vous sportif planétaire, les JOP se positionnent dorénavant comme des catalyseurs de changement à travers le sport.

Le Comité International Olympique (CIO) à l’heure du développement durable

Récemment, la collaboration entre le CIO et les Nations Unies (ONU) s’est considérablement renforcée. En 2009, l’Assemblée générale de l’ONU a accordé le statut d’observateur permanent au CIO, lui permettant de contribuer aux programmes des Nations Unies. En 2017, les deux organisations ont consolidé leurs liens à travers une nouvelle approche. L’ONU pourra désormais disposer directement du savoir-faire et de l’expertise du CIO, de ses 206 Comités Nationaux Olympiques et des Fédérations internationales.

Dans l’Agenda olympique 2020, feuille de route stratégique pour l’avenir du Mouvement olympique adoptée en 2014, le CIO souligne la capacité du sport à réaliser 11 des 17 objectifs de développement durable (ODD) fixés par l’ONU à l’horizon 2030. Les 15 recommandations de l’Agenda olympique 2020+5 mettent également l’accent sur le rôle que peut jouer le sport au profit du développement. Le CIO s’est par exemple engagé en faveur du reboisement du Sahel à travers le projet « Forêt Olympique », afin d’améliorer la sécurité alimentaire et multiplier les sources de revenus des communauté locales.

Les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), un accélérateur pour le SDP ?  

Au-delà de l’impact économique et urbanistique, la notion d’héritage, introduite dans la Charte olympique en 2003, est désormais privilégiée pour appréhender les conséquences des Jeux depuis Londres 2012. Le concept de legacy, bien plus large que celui d’impact, renvoie à des dimensions matérielles et immatérielles. Il s’agit de mesurer l’effet causal des JOP sur un grand nombre de variables de résultats recouvrant des thématiques variées : activité économique, emploi, bien-être, pratique sportive, flux touristiques, environnement, etc. (Collinet & Schut, 2020). Ainsi, le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (COJOP) de Paris 2024 mise sur les Jeux pour favoriser le sport-santé et lutter contre la sédentarité. Le COJOP a aussi lancé, en partenariat avec l’Agence française de développement (AFD), l’appel à projets « Impact 2024 International » pour encourager le développement par le sport en Afrique.

Par ailleurs, les JOP possèdent une forte portée médiatique et peuvent représenter une vitrine pour l’utilisation du sport comme outil de développement. A Tokyo, près de 49 % des athlètes sont des femmes. Cette quasi-parité représente un pas symbolique vers l’égalité des sexes. Depuis les JOP de Rio 2016, une équipe olympique des réfugiés concoure sous la bannière du CIO. L’occasion de sensibiliser le grand public aux problématiques spécifiques des réfugiés et de promouvoir un message d’espoir et d’intégration à échelle internationale. Les Jeux Paralympiques sont un levier pour l’égalité des droits et la lutte contre la discrimination des personnes handicapées. Arnaud Assoumani, Champion paralympique de saut en longueur et Sport Impact Leader en témoigne : « Nous sommes tous égaux sur le terrain ».

Une tribune pour les pays en développement

Vecteurs de prestige national, les JOP sont devenus un enjeu des relations internationales. Pour les pays en développement, la diplomatie sportive revêt une importance particulière car elle offre une tribune mondiale plus facilement accessible. De fait, l’un des premiers réflexes des jeunes États africains indépendants fut d’adhérer en masse au CIO (Arboit, 2009). Les athlètes médaillés participent à la promotion d’un modèle et à la conciliation nationale. Par exemple, la presse internationale a largement relayé la victoire surprise du tunisien Ahmed Hafnaoui en finale du 400 mètres nage libre à Tokyo, une « grande réussite pour le sport tunisien, arabe, africain et méditerranéen ».

Ainsi, l’attribution des Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) 2026 à Dakar serait en partie due à une diplomatie sportive efficace. Les JOJ s’inscrivent dans la stratégie de développement économique et social du Sénégal, qui mise sur les retombées en termes de consommation, la création d’emploi, d’infrastructures sportives durables et l’augmentation des opportunités d’investissement dans le secteur sportif (AFD, 2019).Ce rendez-vous mondial de la jeunesse, vitrine inédite pour l’Afrique en général et le Sénégal en particulier, permet également d’utiliser le sport pour promouvoir l’accès à l’éducation, à la santé et favoriser l’adoption de modes de vie sains.

Les Jeux restent une opportunité pour développer des initiatives sportives à impact social et accroître la visibilité du sport comme outil de développement. Néanmoins, la question de l’héritage reste controversée, même si « les difficultés à rendre compte des bienfaits sociaux des grands événements sont inversement proportionnelles aux facilités à montrer leurs difficultés économiques » (Collinet & Schut, 2020). Par ailleurs, de nombreux acteurs sportifs et du SDP appellent le CIO à plus d’engagement envers les droits humains, la justice raciale et l’inclusion sociale, notamment en modifiant la règle 50 visant à interdire toute manifestation politique lors des JOP, afin que le sport, phénomène social et universel, puisse durablement faire bouger les lignes.