Acteur incontournable du développement de la filière sport en Afrique, le secteur public a aussi un rôle à jouer en matière de sport au service du développement et de la paix (SDP).

Parier sur le sport comme moteur de développement implique la mise en place de stratégies coordonnées, au sein desquelles le secteur public peut jouer un rôle prépondérant. Gouvernance, régulation, support technique et financier, leadership : son action peut revêtir plusieurs formes.

Un secteur public au cœur des politiques sportives

La majorité des pays africains ont élaboré une politique sportive adaptée à leurs objectifs respectifs. Organisées en 2008 par le ministère de la Jeunesse et des Sports marocain, les Assises Nationales du sport ont abouti à la définition d’une Stratégie nationale du sport (2008-2020) comprenant cinq leviers stratégiques, dont la promotion du sport et de la pratique sportive, la modernisation de la gouvernance du secteur et la réforme du système de formation et de professionnalisation des métiers du sport. 80 % du budget est consacré au développement des infrastructures (PwC, 2020). En 2020, l’Afrique du Sud s’est dotée d’une stratégie nationale de développement du sport à l’horizon 2025. Sous la tutelle du ministère des Sports, des Arts et de la Culture, cette dernière vise à (1) développer la pratique sportive et ses valeurs au quotidien ; (2) générer une nation sportive et un creuset de champions. Parmi les cinq grands axes stratégiques, la priorité est donnée à la « nation active », qui favorise l’accès aux loisirs sportifs pour tous dans un objectif de bien-être, d’intégration sociale et de prévention des comportements à risque (délinquance, santé).

Les politiques sportives africaines souhaitent faire du sport une source d’opportunités socio-économiques, financières et de rayonnement international. Néanmoins, l’inclusivité reste primordiale pour ces pays émergents et le secteur public peut y contribuer. Par exemple, le développement des compétences spécifiques des acteurs sportifs devrait relever d’une offre de formation accessible à tous. La pratique sportive de masse et le sport scolaire sont souvent freinés par le manque d’équipement. Si toutes les régions marocaines possèdent désormais des infrastructures de proximité, le ratio restait d’une infrastructure pour 68 400 marocains en 2018 (PwC, 2020). Les gouvernements doivent donc « organiser le sport, l’intégrer aux politiques de développement afin qu’il participe au développement économique, social et culturel des jeunes nations » (Kpazaï, 2012).

Le rôle du secteur public dans le sport au service du développement et de la paix (SDP)

Secteur émergent de la coopération au développement, le SDP représente « l’utilisation intentionnelle du sport et de l’activité physique comme outil pour contribuer aux objectifs de développement et de paix » (Dudfield, Dingwall-Smith, 2015). Le SDP promeut des résultats au-delà du terrain de jeu (santé, éducation) plutôt que des performances sportives. Le développement du sport et le SDP sont deux approches différentes mais interdépendantes. Ainsi, « le SDP doit faire partie du développement du sport, mais s’en distinguer et maximiser son impact en recherchant ceux qui ne sont pas déjà engagés dans le sport » (Kidd 2008). En termes de changement social, « le sport, seul, a peu de chances de réussir. Mais il en va de même pour les programmes utilisant le sport comme support, sans expertise ni infrastructures » (Sanders, 2017).

Le rôle du secteur public dans le SDP dépend en partie de la conception étatique en vigueur (néolibérale, socio-démocrate, développementaliste). En Côte d’Ivoire, l’organisation du sport relève de la compétence de l’État qui, par le biais du ministère des Sports, soutient et supervise l’activité des personnes morales en ce qui concerne la pratique du sport et l’organisation de compétitions nationales ou internationales. Au Kenya, si « les politiques et dispositions législatives relatives au sport semblent obsolètes […], les efforts du gouvernement pour le renforcement des capacités et de la formation, ainsi que dans la mise en place d’un environnement propice au fonctionnement de la société civile et du secteur privé sont reconnus ». « La gestion du sport et développement est vigoureusement poursuivie par diverses ONG et entreprises privées et le pays excelle dans des domaines comme le sport et les jeux traditionnels, […] l’éducation sportive à l’école et le développement de la jeunesse » (ICESSD, 2014).

Généralement, « il est recommandé que l’État se concentre sur le leadership dans le SDP, y compris la politique, la législation, la régulation et la surveillance, et sur la formation de partenariats solides avec les autres secteurs afin de garantir que les efforts soient efficaces, efficients et soumis à évaluation. Il peut toujours conserver la capacité de financer ou de réaliser des projets spécifiques et des initiatives d’envergure si besoin » (Sanders, 2017).

Ainsi, le rôle du secteur public en matière de développement du sport et de développement par le sport dépend de divers facteurs. Pour autant, la nécessité de favoriser les synergies entre les secteurs public et privé, la société civile et le monde académique afin d’optimiser le potentiel du sport pour le changement social fait l’objet d’un large consensus.